Discursul primarului adjunct al Parisului, la inaugurarea Promenadei Regina Maria a României
Votre Majesté, Votre Altesse Royale, Monsieur l’adjoint au Maire du 7e arrondissement de Paris, cher M. Bernard, Monsieur l’Ambassadeur de Roumanie en France, Mesdames et messieurs les Ambassadeurs et représentants des corps diplomatiques, Madame la Conseillère d’État auprès du Président de la Roumanie, Mesdames et messieurs les élus, Mesdames et messieurs les représentants des cultes, Monseigneur Joseph, Mesdames et messieurs, Il y a cent ans, en mars 1919, la reine Marie de Roumanie s’apprêtait à fouler le sol parisien pour participer et représenter son pays à la conférence de paix, après de longues années de guerre. Dans le train qui la conduisait à Paris, en gare de Laroche, une envoyée spéciale du journal Le Matin monta sans prévenir. Avec audace, bravant la sécurité de Sa Majesté avec un bouquet de fleurs à la main, la journaliste interpella la reine en ces mots : « Comme Paris va vous aimer, Madame! ». Cette journaliste, c’était Colette. Lettrée et cultivée, Marie de Roumanie l’avait bien reconnue. Et Colette ne s’était pas trompée. C’est en effet avec ferveur et enthousiasme que les Parisiens ont accueilli la reine à son arrivée Gare de Lyon. Avec du respect bien sûr, pour cette dirigeante courageuse qui ne craignait ni les balles ni les bombes lorsqu’elle s’est engagée sur le front comme infirmière à la Croix-Rouge. Avec de la reconnaissance aussi, pour cette diplomate talentueuse qui a œuvré au rapprochement de son pays avec les alliés de la Triple Entente. Avec de l’admiration enfin, pour cette artiste indéniable qui fût la première femme élue membre associée de l’Académie des Beaux-Arts en France, en janvier 1918. Ce 5 mars 1919 donc, Marie de Roumanie séduit Paris. Alors que l’Europe est un vaste champ de ruines, que les peuples ont été durement éprouvés par une guerre fratricide qui paraissait sans fin, les Parisiens découvrent cette figure aux multiples racines européennes, cette reine anglaise et russe par le sang, roumaine par le cœur, et que la République française décore de la Grand-Croix de la Légion d’Honneur. La presse suit avec une grande attention cette ambassadrice irrésistible et négociatrice hors pair au service des intérêts de son pays, qui n’a pas peur de s’entretenir longuement avec Clémenceau pour qu’une Grande Roumanie unifiée voit le jour. Adroite et subtile, elle avait compris qu’il lui fallait le soutien du Tigre pour demander la part du Lion. Alors bien sûr, nous honorons aujourd’hui la mémoire de Marie de Roumanie pour son rôle déterminant dans la Grande Guerre et pour l’ensemble de son œuvre. Une mémoire que le régime communiste en Roumanie a caché aux yeux du monde pendant près de 40 ans, et qui a été largement redécouverte après 1989. Et nous honorons bien sûr cette mémoire dans la poursuite de la Saison France-Roumanie 2019, et dans le prolongement de deux centenaires : celui de la fin de la Première Guerre mondiale, et celui de la création de la Roumanie moderne. Mais il est évident qu’il y a bien plus que cela dans cet hommage qui nous réunit tous cet après-midi. Il y a dans l’histoire, le parcours et la personnalité de Marie de Roumanie un condensé d’une plus grande histoire encore : celle d’une relation d’amitié entre nos deux pays. Une relation qui s’enracine dans notre matrice latine commune, dans cette antique « Romanie » qui réunissait les peuples de la « Mare Nostrum ». Une relation qui s’est entretenue à travers les âges et dans les esprits, comme à l’époque du « Printemps des peuples » en 1848. Beaucoup d’étudiants roumains du quartier latin de Paris, comme Nicolae Balcescu, ont puisé alors dans les cours de Jules Michelet et d’Edgar Quinet, les idées démocratiques d’abolition des privilèges et d’émancipation des minorités nationales qui devaient les guider ensuite dans le mouvement révolutionnaire roumain. Au siècle suivant, cette amitié s’est renforcée dans la fraternité d’armes. Je pense aux 2 000 soldats français sous le commandement du Général Berthelot venus combattre aux côtés de l’armée Roumaine, pour résister face à l’armée allemande sur le front de l’Est, comme Marie de Roumanie l’avait appelé de ses vœux. Et puis cette histoire que nous avons en partage s’est enrichie d’échanges intellectuels et artistiques. Que serait Paris, que serait la France sans la dramaturgie d’Eugène Ionesco, sans la plume de Tristan Tzara, sans le verbe d’Anna de Noailles, ou sans le génie du sculpteur Constantin Brancusi, l’un des grands précurseurs de l’art abstrait qui a travaillé avec Rodin et dont l’atelier a été reconstitué à Paris, devant le centre Pompidou ? Autant de personnalités roumaines et parisiennes à la fois qu’elles en sont devenues universelles. Oui, il y a un peu de tout cela derrière la mémoire de Marie de Roumanie et l’hommage que nous lui rendons aujourd’hui. Mais cette relation à nulle autre pareille n’est pas seulement un héritage du passé à célébrer, c’est là le ferment d’un avenir qu’il nous appartient de construire ensemble. Un avenir résolument tourné vers la consolidation d’une Europe fidèle à ses valeurs et à sa promesse de paix, pour lesquelles tant de nos soldats français comme roumains se sont sacrifiés sur les champs de bataille. Un avenir débarrassé des stigmatisations et des préjugés que nous pouvons avoir les uns des autres et qui sont encore – hélas ! – à l’œuvre dans l’inconscient collectif. Le chemin est certes encore long, mais la confiance est grande. La Saison culturelle France-Roumanie qui vient de s’achever aura contribué, sans nul doute, à nous rapprocher encore et toujours un peu plus. Et en inscrivant aujourd’hui le nom de Marie de Roumanie dans l’espace public, avec tout ce qu’il rappelle de l’histoire partagée entre nos deux pays, Paris fait sienne l’affirmation de Colette à la reine : oui, Paris vous a aimé, Madame, et vous aimera toujours. Catherine Vieu-Charier Adjointe à la Maire de Paris
©AGERPRES Silviu Matei |
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